le Clube
NE VOUS FAITES PAS TIRER L'OREILLE
Après le succès de Baccade, Yves Renou nous
revient avec un nouveau jeu de cartes : rassurez-vous, "Fais pas l'âne"
est bien dans la même veine, pour ne pas dire dans la même verve,
que son cochon d'aîné! Mais si Baccade était un petit
jeu sans prétention au charme indéniable, "Fais pas l'âne"
est une formule enrichie qui mérite qu'on s'y attarde.
L'idée de base reste simple : réunir 2 bourricots, de la même
couleur que l'un des rares bonnets d'âne disponibles dans le jeu. Pas
de quoi fouetter la bête ? Patience, patience... car "Fais pas
l'âne" recèle des cartes spéciales, souvent savoureuses.
Il parait d'ailleurs impossible de ne pas les évoquer ici... puisque
ce sont elles qui font l'animation autour de la table.
Il y a d'abord les amuse-gueules : la carte "prout-prout"
a prouvé qu'au Clube , nous sommes toujours partants pour régresser.
Comme en plus, elle empêche votre victime de jouer pendant 2 tours,
on y prend goût. La carte "Hi-han" qu'on pourrait croire anodine
est une pure merveille à double tranchant : puisqu'il faut avoir en
main uniquement ses 2 ânes et son bonnet pour gagner, il faudra vous
en débarrasser en vociférant (mais chacun son style) un braiment
digne de toute bête de scène. Les autres autour de la table acclameront
alors leur nouvelle idole ou crieront "t'es juste bon à faire
un mauvais saucisson". Soyons clairs, la décision du jury prendra
rarement en compte vos qualités d'interprétation... mais vous
jugera sur le nombre de cartes que vous aurez alors en main : en effet, selon
votre performance, vous hériterez ou non de 2 cartes de la pioche.
Comme l'art de la défausse est l'une des clés du jeu, on aurait
tendance à pénaliser l'artiste en herbe par cette donation généreuse.
Mais est-ce que piocher plus de cartes ne donnerait pas de quoi réunir
la combinaison magique ? Hmmm ? Cruel dilemme. Si vous savez aussi bien braire
que bluffer, ça va être chaud...
Certaines cartes vous autorisent à contrer une action adverse, à
négocier un ou plusieurs échanges et à parier sur votre
victoire finale ou sur celle de l'un de ces bestiaux qui forment le cercle
de vos amis. Mais attardons nous sur 2 cartes : la redoutable "Ânerie"
vous permet de piocher 3 cartes dans un jeu adverse ou d'échanger votre
jeu complet avec celui - par exemple - de ce fieffé José (une
bonne tête de vainqueur celui-là) : il faut dire que le José
est devenu le roi de la défausse depuis 3 tours. Ça sent le
sprint du 14 juillet et c'est la panique générale au sein de
vos 27 cartes. Et oui, vous faites dans la collectionnite aiguë et ce
rôle de Marquise à l'éventail commence à vous peser.
Alors c'est José qui va désormais goûter aux joies de
l'haltérophilie... pendant que vous filerez vers un triomphe certain,
grâceà son jeu gagnant. Mais c'était oublier que José,
c'est de la pure race de filou... et que son jeu n'était que du menu
crottin. Et lui, cet athlète de haut niveau qui tient désormais
vos 27 cartes sans que ses coudes prennent appui sur la table, il n'a que
l'embarras du choix pour former une combinaison gagnante. Quant à vous,
il va falloir piocher, et encore piocher. Ce serait votre tombe que cela reviendrait
au même. Vous vous vengerez alors sans doute avec "têtu comme
un âne..." qui oblige tous vos adversaires à piocher, piocher,
et encore piocher (5 cartes maxi quand même) jusqu'à obtenir
un âne de la couleur que vous aurez exigée.
Comme pour Baccade, les illustrations de Valérie Michaut font merveille
: D'une drôlerie jamais désavouée, empreinte d'une poésie
qui laisse rêveur, on est sous le charme. Alors bien-sur, il faut se
laisser happer par cet univers de roudoudous et de carambars au foin, ne pas
attendre de "Fais pas l'âne" une révélation
divine. Vous aurez alors sans doute beaucoup de plaisir à jouer avec
vos enfants... et même entre adultes. Aux Clube, certains ont été
sincèrement conquis.
A l'approche de Noël, voici l'occasion de ne pas faire d'erreur sous le sapin. Le jeu contient également un conte et l'histoire de 'l'académie des ânes". Une fois de plus, Yves Renou a tout compris : le jeu est un merveilleux support pour la découverte. Et comme il sait insuffler une complicité sans égal, on reste sous le charme une fois de plus.
TIRE
AU FLANC
Les premiers tours sont souvent un peu fastidieux : sauf miracle, on pioche essentiellement de quoi réunir quelques possibilités de combinaison Les bonnets d'âne étant vraiment peu nombreux, vous risquez de trouver la partie quelque peu ennuyeuse si vous ne bénéficiez pas non plus de carte "ânerie" vous permettant d'échanger votre jeu l'explication des cartes nécessite un peu d'attention, car certaines offrent 2 possibilités d'action et des petits points de règles peuvent prêter à confusion. Heureusement, vous pouvez introduire au fil des parties les cartes spéciales pour ne pas dérouter les plus jeunes Si vous jouez entre ânes amoureux de l'alambic, il n'est pas toujours évident de se souvenir en fin de partie "qui a misé sur qui" Impossibilité de piocher dans la défausse un âne ou un bonnet ? Ha bon... Dans un même tour, on peut se défausser de 2 cartes strictement identiques. Et pourquoi pas de 3, 4 ou 5 ? Cela pourrait accélérer un peu le jeu... et donner une solution de défausse spectaculaire qui pourrait même vous mener à la victoire Il y a quand même un véritable problème de couleurs pour différencier certaines familles d'âne