le Clube
A LA DECOUVERTE DE DRACO & CO
Première mise en bouche
pour ce nouveau cru 2001 chez Blue games : Draco & co, avec lequel Bruno
Faidutti, serviteur patenté du chaos universel, revient sur le devant
de la scène après le très intéressant "l'or
des dragons". Malgré les apparences, l'idée initiale de
Draco & co appartient à Michael Schacht. Mais Bruno aime les jeux
qu'il aurait pu inventer et la partition solo s'est finie à 4 mains.
Il faut croire que ce jeu porte vraiment sa griffe puisque l'un de nos joueurs
s'est exclamé en fin de partie "ça me fait penser à
tempête sur l'échiquier" , sans savoir que c'était
du même auteur !
Qu'on aime ou non la collection "mid-price" de Descartes, il faut
reconnaître que c'est une lucarne indispensable dans le paysage éditorial
français. Draco & co est le 6e du nom : une centaine de cartes,
une cinquantaine de pièces de monnaie en bois (or et argent), une mignonnette
coupe pour trinquer, un dé, une règle en couleurs et vous avez
le contenu de la boite. Pour 90 F (en promo), on va pas cracher dans la sou-soupe.
Même si le mal aimé "Zork", vite surnommé chez
nous "Fabius", fut le plus difficile à assimiler pour cette
première partie, le reste du jeu est vite digéré et l'objectif
est si clair (être du bon côté de Draco) que les joueurs
sont vite impliqués. L'absence totale de stratégie au profit
d'un chaos qui fera fuir certains joueurs, évite les tergiversations
: on est ici pour se faire des coups pendables entre brigands, sans autre
arrière pensée que de bénéficier des largesses
enivrées de Draco. Le plaisir dans cette valse de chaises non musicales,
c'est bien-sûr les cartes-action qui amènent de véritables
retournements de situation. On rit sous cape en attendant son tour -que dis-je
- son mauvais tour. Le jeu manque parfois de dynamisme, plombé par
une lecture de vos cartes qui ne vous dispensera pas d'une relecture le moment
venu. Surtout, Draco & co rendra vos plans obsolètes à la
moindre carte jouée par les autres brigands et il faudra donc vous
adapter en permanence, et parfois choisir la carte action qui vous désavantage
le moins ! Alors on lit et relit... et cela ralentit le jeu là où
on aimerait que cela fuse. D'autant que certaines cartes sont étouffées
par des pavés de texte presque illisibles, venant vous rappeler qu'il
faudrait reprendre rencard chez l'ophtalmo. Il y a aussi peu d' interaction
possible pendant le tour d'un autre joueur : excepté une carte qui
permet de trinquer à tout moment, il n'est pas possible de contrer
une action au moment où elle est jouée. Quitte à être
prisonnier du chaos, pourquoi ne pas s'y vautrer, au moins avec 2/3 cartes
supplémentaires ?
La clé de voûte de Draco, en fait, ce sont ces trois personnages
spéciaux : "Frère Jean", "Tante Sarah" et
"Zork". Suivant leur place (et la votre), vous pourrez gagnez de
l'argent, en perdre ou récupérer des cartes. Le plus fascinant,
c'est Zork, idole de la jet-set avant l'heure. Il vit au crochets des plus
riches... et vous fera perdre quelques pièces si votre trésor
est le plus dodu. Vous l'aurez compris : l'emplacement autour de la grande
table de ces 3 olibrius n'est pas à négliger... et permet au
jeu de ne pas se focaliser sur Draco et son butin. C'est sans doute ces trois
personnages qui vous feront aimer Draco & co.
La petite déception vient des illustrations de Julien Delval. Si elles
sont réussies pour les personnages, elles nous ont laissés sur
notre faim en ce qui concerne les cartes action. Peu de dessins différents
(8 pour 74 cartes) ... et surtout, un sentiment de bâclé, du
genre treize à la douzaine. Sauf que là, c'est plutôt
huit à la douzaine. Il y a - à notre sens - une vraie erreur
de concept graphique pour ces cartes action. (la
preuve en images)
Nos 4 joueurs, peu aguerris à ce type de jeu chaotique, ont visiblement
pris du plaisir, trop heureux d'oublier pour un soir les stratégies
sponsorisées par Upsa. Hormis le toujours sévère Lolo
et sa note de 5, c'est un 7 qui scella le jugement des 3 autres. Plutôt
une bonne entrée en matière même si, de l'aveu de chacun,
le chaos, c'est bien une partie... mais de là à remettre ça
la même soirée, faudrait voir à se calmer. Chez les joueurs
chevronnés, ces espèces de "bois-sans-soif" en quête
insatiable de nouveauté, le jugement risque d'être plus impitoyable.
L'approche ludique de Draco ne manquant pas de rappeler "Guillotine"
ou "Service compris", il risque fort de faire doublon si vous possédez
déjà l'un ou l'autre...
Draco & Co reste cependant un jeu bon enfant, où il est intéressant
de joindre le geste à la parole... et trinquer pour de vrai ! Nos 4
testeurs avaient jeté ce soir là leur dévolu sur un blanc
d'Anjou, délicieux... même si les gobelins l'ont trouvé
trop moelleux. La réélle dimension ludique de Draco & co
est peut-être bien là...