MONTE LA DESSUS ET TU VERRAS UN BON JEU
Quelle belle histoire que celle d'Himalaya qui fera rêver sans doute pendant des années tous les auteurs en herbe. Tout a commencé en 2002 avec un prototype intitulé Marchands d'Empire : nous étions alors loin des montagnes tibétaines de la version commerciale. La grande idée - puisqu' on connait la suite de l'histoire - fut de mettre ce fameux prototype sur la toile. Téléchargeable et jouable par tous, Marchands d'Empire n'avait qu'à prendre son mal en patience et prier que quelque aventureux joue des ciseaux. Sans les réelles qualités du jeu, nul doute qu'il n'y aurait pas eu pareil bouche à oreille. Et puis les choses se sont enchainées : le jeu fut traduit en anglais ou en japonais, un tric trac de bronze tomba dans l'escarcelle, puis un prix au concours des créateurs de Boulogne.... la route s'annonçait belle et ensolleillée.
Et effectivement, fin 2004, le jeu pointait le bout des cîmes au Salon d'Essen. Tilsit aux manettes, avec un bonus thématique signé Guillaume Blossier... tous ceux qui s'étaient soudés les doigts avec un tube ratatiné de colle scotch allaient pouvoir verser une larme sur leurs Marchands d'Empire désormais collector et faire place nette aux caravannes de yacks. Himalaya est désormais là, dressé comme un roc au coeur de la récente "collection Tilsit". L'éditeur, parfois bousculé par des joueurs toujours trop gourmands, tenait là matière à réconciliation.
Prenez quelques bons ingrédients éprouvés, dosez-les avec justesse pour qu'aucun ne prenne le dessus sur l'autre et vous obtenez un jeu fluide, que tout le monde maitrise dès le premier tour tant il est logique dans sa construction mécanique. Himalaya est tout à la fois un jeu de programmation, de gestion et de majorités. Les joueurs vont de village en village, acquérir des ressources, puis, en échange de celles-ci, tentent d'asseoir leur influence dans 3 domaines : politique, religieux et économique.
Seuls 5 des 20 villages présents dans cette contrée fort enneigée permettent de vous approvisionner. Au fil des tours, les villages producteurs pourront changer, tout comme les 5 villages en attente de ces ressources. La première bonne idée du jeu, c'est la hiérarchisation des marchandises proposées, qui autorise un visiteur à ne prendre dans un village que celle de plus faible valeur. Afin d'acquérir les plus rares, vos Yacks traineront un peu des sabots, contempleront ce magnifique paysage déseperemment blanc de blanc "Oh, tu as vu comme la neige est belle ici ?". Avec un peu de culot et un fin calcul, une caravanne adverse passera se servir avant, vous laissant ainsi la part (plus) belle.
Tout se joue au début de chaque tour. Chacun programme secrètement 6 phases de déplacement/action. A vous d'optimiser, anticiper, bluffer.... pour avoir le bon tempo et agir selon vos priorités. Car il ne s'agit pas de faire du troc en touriste : dès l'acquisition des ressources, il faut faire preuve de vigilance et de discernement. Certains cherchent à avoir en stock les 5 marchandises, afin de répondre à toute éventualité, d'autres misent sur le flux tendu en fonction des villages qu'ils ciblent et les plus retors, cherchent un monopole sur une marchandise, afin de réduire - et donc de contrôler - le champ d'action de ses concurrents.
Vos Yacks chargés à bloc, il ne s'agit pas de se lancer dans une tournée des grands ducs. Selon sa taille ou son emplacement, chaque village sert plus ou moins vos intérets. En échange de vos marchandises, vous pourrez y construire une Stupa (église), envoyer des délégations dans les régions voisines ou obtenir quelques bêtes supplémentaires pour agrandir votre troupeau. En tout, 3 possibilités d'action dans chaque lieu mais seulement 2 réalisables, avec plus ou moins d'impact (en religion et politique) si un temple ou un monastère s'y trouvent.
Il faut donc calculer le bon ratio, et se demander si les ressouces livrées (de 1 à 3) dans un village feront pencher la balance du bon côté en fin de partie. Car l'autre très bonne idée d' Himalaya, c'est ce décompte "à l'australienne" (dans la configuration 4 joueurs") qui élimine d'abord le joueur le plus faible en influence religieuse, puis celui le plus faible en politique.. pour laisser les finalistes se départager en fonction de la taille de leur cheptel. Tout au long de la partie, il faudra donc observer, se placer, garder son avance en politique ou religion... et ne pas négliger la partie économique qui - seule - vous donnera la victoire.
Une prise en main aisée, un combo de mécanismes variés, un thème exotique non rabaché... la recette a séduit à juste titre le jury du SdJ 2005 en faisant figurer Himalaya parmi les 5 meilleurs jeux de l'année. Que voulez-vous dire de plus après ça ?
MORNE PLAINE
Il n'est pas rare que le vainqueur soit désigné au dernier tour, uniquement parce qu'il était le plus proche d'un nouveau village "demandeur". Ce "Au bon moment, au bon endroit".... annule d'un coup la construction de 12 tours de jeu et de 90 mn de troc des autres joueurs ? Hum... ça va pas plaire à tout le monde cette hitoire... • La configuration à 3 joueurs ne permet pas le décompte à l'australienne, qui rend la partie bien plus excitante • Est-ce une erreur de fabrication générale ou un mauvais exemplaire ? Quoi qu'il en soit, on a du jouer du cutter pour que les rabats des paravents puissent s'insérer et tenir l'ensemble droit • La couleur des cubes "marchandises" ne correspondent pas exactement à celles du memo des paravents • La premiere édition du plateau de jeu comportait une erreur de numérotation des villages !!! Qui relit chez Tilsit ?? Hein ? • Un joueur qui se sait condamner, faute d'influence religieuse suffisante, risque de décider qui ira en "finale" selon le placement de ses délégations au(x) dernier(s) tour(s) • Certains tours manquent de saveur car le choix des actions est évident : et ne plus sa casser la tête pour savoir si ce foutu yack adverse va ronfler un peu, beaucoup, à la folie...avant de reprendre sa route, ça le fait moins au niveau de la tension ludique • A 3 joueurs, il y a moins d'interactions entre les joueurs. Surtout, un joueur peut se retrouver "dans son coin" : ça peut lui arranger les affaires... mais aussi un peu le faire bailler.