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12 mois dans la vie d'un joueur sont toujours trop courts. Trop de jeux à découvrir, à dompter, à ranger dans une minuscule armoire (si-si chérie, elle est mi-nus-cule !), trop de choses à lire ici ou là, trop de gens à convaincre. Et lorsqu'on est webmaster d'un site dédié au jeu, le diable vous a confié depuis longtemps les clés de l'enfer : "Tiens, je t'ai fais un double : j'en ai un peu marre de devoir t'ouvrir à point d'heure.

Essen vient de fermer ses portes, le web ludique s'enflamme et les petits ogres que nous sommes, affamés de pions à peine sortis des machines de production, frémissent, trépignent. Qu'importe si l'ivresse nous promet la gueule de bois : une nouvelle saison commence. Déjà ? Mais moi je n'ai pas encore joué à Graenaland, à Ur et tant d'autres. C'était encore hier, je vous promets. Oui mais c'est trop tard mon vieux.

Seulement voilà. Au moment où j'écris ces lignes, la tempête n'est pas encore arrivée jusqu'à moi. Ce n'est plus qu'une question d'heures et je profite de ce calme en trompe l'oeil pour regarder dans le rétroviseur. Plus que les jeux passés, c'est un itinéraire que j'ai en tête : le mien pour tout dire. Parce qu'après la léthargie estivale qu'a connu ce site, il fallait me remettre dans le bain, reprendre mes gammes, avec un édito sans doute plus personnel, loin du tumulte ambiant. L'effet province sans doute.

A nouvelle vie, nouveaux joueurs. Du haut de mes montagnes retrouvées, Paris se rétrécit à vue d'oeil. J'y laisse des amis, des joueurs, parfois les deux. J'y laisse les allumés du Clube avec qui cette fièvre du jeu a commencé. Il y a 10 ans. Et maintenant que je sens cette même fièvre gagner l'Europe, je me mets à penser "village". A mon village. A mon nombril de joueur.

Petit coup de blues. Je songe à mes brunchs parisiens. Au premier, commencé par une partie d'Unanimo, à celui de Noël 2005 avec son sapin, ses cadeaux et vos lettres au Papa Clube, au "spécial Chevaliers de la table ronde" et à la galère pour ramener la maquette 3D chez Days of Wonder, aux changements de restaurants, avec plus ou moins de réussite, aux montagnes de sacs de jeux montés sur roulettes pour faire la traversée de Paris, croisant avec ironie les caddies des cloches du coin. Voilà des mois que j'essaie de faire perdurer - même à distance - ce rendez-vous dominical mais cela devient de plus en plus compliqué. Et en mars dernier, je craignais que le 37e brunch du Clube soit le dernier. Ce ne sera pas le cas* mais l'histoire ne peut plus totalement être la même.

La désintoxication parisienne avait commencé par une première escale auvergnate, au coeur d'un désert ludique qui me fit longtemps peur. Je me rappelle de mon post sur le forum Tric-Trac "Cherche joueur près de Clermont-Ferrand". Une seule réponse. De belgique! C'était Dom du Repos du Guerrier, prêt pendant les vacances à faire un détour par chez moi avec son camping-car et sa famille. Je le remercie encore de m'avoir sauvé de la déprime cet été là. Suivirent des week-ends divins avec quelques bruncheurs, venus goûter l'air de la campagne, le Saint-Nectaire …et explorer ma petite caverne d'Ali-Baba, au fond du jardin. Ludovic, spéléologue masochiste, prenait un malin plaisir à y dépoussiérer des jeux improbables. Culture Pub connut ainsi son heure de gloire. Sans doute la seule.

J'ai tiré un trait, horizontal, sur la carte, que j'ai suivi pendant 300kms, du Puy-de Dôme à ma Haute-Savoie natale. Les champs de pommiers et de maïs avaient rendu l'âme, désormais infestés de champignons à toit pentu et piscine. Mais j'étais là avant. Avec les pommiers. Me revoilà dans la place, bien décidé à faire sonner le tocsin dans une ville qui s'embourgeoise de trop, bercé par son joli lac.

Ici, je retrouve Alea Jacta, un petit groupe de joueurs motivés. Je ne dépérirai donc pas. Mais mes vieux démons reprennent vite le dessus et je n'ai qu'une obsession: planter un étendard ludique au plus haut sommet de ma commune. La fête du jeu est à l'horizon mais le Maire ne semble pas s'ébahir des centaines de jeux que je propose de mettre en pâture sur sa grande place. Ici, on fait du ski, de la voile, du vélo, de la rando... serait-il impossible de solliciter tous les muscles du Savoyard ?

J'allais trouver un allié aussi rapidement que fortuitement: Christophe. Propriétaire à Annecy d'une toute nouvelle boutique de jeux (Ludocortex), "mon retour au pays" lui était arrivé aux oreilles. Un petit mail, une rencontre et nous voilà plein de bonnes intentions pour qu'Annecy ne soit plus uniquement une ville de festivals cinématographiques. Asmodée nous mettra définitivement le pied à l'étrier.

Contacté dans un premier temps pour faire des dates "Café tour" sur Paris, je propose à l'éditeur-distributeur de les faire à Annecy. Commence alors un long périple pour trouver un lieu susceptible d'accueillir ce rendez-vous. Et je m'arrache les cheveux. Les bars sont trop petits, trop sombres, trop touristiques et surtout trop fermés le soir venu. Asmodée avait sans doute eu raison d'écarter jusque là Annecy de son plan d'action. 3 lieux finissent malgré tout par retenir mon attention, dont un qui est en travaux. Il s'appelle le Repaire. Ça sonne bien. Je consulte Christophe et, amusante coïncidence, il avait, quelques mois auparavant, interrogé le patron sur la possibilité de faire des soirées jeux. Celui-ci n'avait pas fermé la porte. Il va nous l'ouvrir.

Il s'appelle Marc. Il a repris cette brasserie il y a peu. Il vient de Paris où il avait un bar à côté du jardin du Luxembourg. Les joueurs, il connaît : 4 personnes qui squattent une table pendant 3 heures avec "2 cocas et deux verres d'eau siouplait". Mais cela ne l'empêche pas de nous dire : "Essayons, on verra bien..."

Mars 2006. J'espérais mieux des deux soirées Asmodée : si le réseau ludique de Christophe et mon cercle d'amis répondent bien présents, la radio annécienne reste sourde lorsqu'on lui demande de relayer l'info, l'autre boutique de jeux d'Annecy ne se donne pas la peine de communiquer et les jolies vitrines du centre-ville refusent toute affiche. La neige s'invitera même lors du second Café-Tour : Bruno Cathala en fit l'amère expérience, obligé de reprendre la route dès 22h pour ne pas se faire piéger. Difficile dès lors de jouer à guichets fermés .

Qu'importe. On persiste et signe. Et Marc accepte de continuer un peu l'aventure, en ouvrant le vendredi soir. Ainsi, deux fois par mois, les soirées jeux se mettent en place. Le noyau dur répond présent. Et surtout, joue le jeu : la formule "2 cocas et 2 verres d'eau" n'est visiblement pas à l'ordre du jour. Les montagnards, ça aime boire et manger ! Reste plus qu'à les convaincre de jouer.

Durant les premiers mois, on s'arrange pour faire "relâche" les vendredis où la MJC locale organise ses propres soirées. La synergie nous semble plus habile que la vampirisation. Le Repaire ouvre pour la Fête du jeu mais sans impact tangible. Rebelote pour la fête de la musique… avec un fiasco logique. On croit voir le bout du tunnel lorsque la presse locale vient faire un article sur notre initiative ludique : un coup d'épée dans l'eau. On en sourit, un peu dépités. Mais le rendez-vous reste à flot grâce aux fidèles, et ceci même en été. Il faut dire que la terrasse est un argument de poids pour les joueurs et un atout pour rendre la thématique du bar visible.

Ça tourne désormais entre 20 et 40 participants. Quelques joueurs commencent même à venir des villes voisines. Le premier pari est gagné mais il faut absolument clarifier l'offre pour franchir un pallier: ouvrir tous les vendredis ! La MJC songe de son côté à changer ses dates. On décide dès lors de sauter le pas.

A la rentrée, le rendez-vous devient hebdomadaire. La montée en puissance est lente mais bien réelle. On lance également les Happy games, une sélection de petits jeux simples (6 qui prend, Non merci, …) mis à disposition tous les jours pour accompagner l'apéritif. Là, on sait qu'il n'y aura pas de miracle tout de suite mais qui ne met pas de ver au bout de son hameçon rentre forcément bredouille.

Marc joue de son côté le jeu à fond, nous ouvre désormais aussi le mardi soir , libère des espaces pour les boites, fourmille d'idées, incite sa clientèle quand il la sent curieuse et dégaine à tout va son arme secrète : le Blokus. Les fidèles, eux, malgré des dizaines de boîtes à leur disposition, se contentent de peu : Yspahan, Thebes, Collosseum, Time's Up, Can't stop, Perudo, Gang of four, voilà les grands gagnants 2007 au Repaire. Habitué à la curiosité des bruncheurs parisiens, je suis un peu déconcerté. Il faut dire qu'à Annecy, j'ai plutôt laissé mon costume d'animateur-incitateur dans la naphtaline.pour jouer à mon tour. Peut-être une relation de cause à effet.

Le Repaire porte désormais bien son nom. Les liens se tissent. Comme une famille recomposée. C'est assez excitant pour tout dire... Et cela ne va pas s'arrêter là. Suite au prochain épisode.

Supercloclo | OCTOBRE 2007

* Les brunchs reviennent avec 40 nouveautés "Essen"
les samedi 3 et 10 novembre.

lire l'édito de juin
"Zooloreto, meilleur jeu 2007 ? "

 

 

 

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